lundi 9 février 2015

Rencontre avec le dernier poisson vertébré...

Retour à Tuléar, appelée aussi "la cité du soleil", car cette ville est écrasée par un soleil implacable! Et, effectivement elle porte très bien son nom, car il fait en permanence entre 29 et 35 degrés la journée. Malgré les flamboyants et les tamariniers, il est difficile de trouver un coin paisible de fraîcheur dans cette ville étouffante et poussiéreuse.
Les rues sont désertées par les gros 4x4 et les taxis; du moins, ils se font rares. Le pousse pousse et le cyclo pousse pousse sont les principaux moyens de locomotion, ce qui donne à cette grande ville aux larges boulevards interminables, une impression de ville morte, de ville fantôme!!

Outre le fait que nous devons reprendre la RN7 pour quitter Tuléar et nous rendre au parc national de l'Isalo, nous sommes ici avant tout, dans un seul et unique but bien précis, celui de visiter le musée de l'Institut des Sciences Halieutiques, qui accueille plusieurs cœlacanthes péchés accidentellement près des côtes de Tuléar. Ne trouvant pas de taxis pour y aller en arrivant à la station de taxi brousse, nous décidons de prendre chacun un cyclo pousse pousse pour nous rendre au port, car nous sommes chargés de nos gros sacs.
Marc nous ouvre les portes de son sanctuaire, il est étudiant en 5ème année de DEA de Sciences Halieutiques, sa spécialité est la taxonomie, soit l'identification des espèces. Il vient de Tana et veut devenir conservateur de musée! Le musée fait parti intégrante de l'université, il a été créé par un docteur océanographe malgache en 1977, du nom de Rabesandratana. Ce petit musée accueille toutes les espèces endémiques de Madagascar, de la gorgone aux crustacées en passant par les mollusques, les éponges, les coraux... On y trouve même des fossiles!
À l'intérieur de ce musée, l'ancienne salle de dissection est dédiée à notre spécimen : le cœlacanthe!!


Jusqu'à ce jour, quatre spécimens de cœlacanthe ont été capturé à Madagascar, tous dans la région de Tuléar, dans le canal du Mozambique. Le premier a été péché en août 1995 à une trentaine de kilomètres au sud de la ville, dans le village de Soalary, dans la fosse de l'Onilahy, à une profondeur de moins de 190 mètres, dans un filet à requin à grosses mailles, dans lequel sont fixés des appâts. Les trois autres sont découverts en 1997, puis deux spécimens en 2001. Des études ADN ont relevé que les cœlacanthes malgaches appartiennent à la même population que ceux des Comores. Le cœlacanthe reste donc, soit par sa réelle rareté soit par son mode de vie très particulier, un animal de capture exceptionnelle dans les conditions de pêches normales.


Historiquement, c'est un poisson archaïque apparu il y a 360 millions d'années. La première pêche est faite dans l'océan indien en 1938, le long des côtes d'Afrique du Sud. Un professeur sud africain, lui donne le nom scientifique " latimeria chalumnae". Un deuxième, puis un troisième cœlacanthe sont découverts dans les années 50, puis 200 sont péchés à Anjouan, une île des Comores. Puis plus rien, jusque les années 90! On en a retrouvé également en Indonésie sur l'archipel des Célèbes.


Mais, c'est quoi le cœlacanthe??? 
Je vais vous éclairer un peu, grâce aux lumières de Marc!
Le cœlacanthe se déplace à l'aide de ses nageoires qui sont au nombre de huit: deux dorsales, deux pectorales, deux pelviennes, une anale et une caudale. Ses nageoires montrent déjà des prolongements en forme de membres. Il se déplace comme une nage à " l'ambre" ( un peu comme la démarche d'un chien! ), c'est l'ancêtre de la patte! C'est pourquoi il suscite tant d'intérêt!! L’axe comprend plusieurs os organisés de manière similaire à ceux de nos membres. On retrouve les éléments homologues à l’humérus, le radius et le cubitus de nos bras, ou au fémur, au tibia et au péroné de nos jambes. Comprendre l’histoire du cœlacanthe, c’est aussi comprendre la nôtre; c’est pour ça que c’est fondamental.
C'est un poisson tranquille, qui semble économiser son énergie lors de ses mouvements, même s'il peut fuir à la vitesse d'un brochet devant quelque danger.
Pour se nourrir le cœlacanthe effectue des migrations nocturnes entre 500 et 1000m de profondeur! C'est un carnivore de poissons vivant uniquement dans les profondeurs abyssales. La journée, il vit en ban, jusqu'à 14 individus, au calme dans sa grotte vers 200 mètres de profondeur, dans une eau avoisinant les 15 à 20 degrés.
Je vais maintenant parler un peu technique, désolée mais c'est important, enfin si vous voulez comprendre qui il est et pourquoi il suscite tant d'engouement!! Le cœlacanthe a une respiration branchiale. Il possède un poumon dégénéré non fonctionnel, qui est infiltré de graisse et qui allège l'animal, comme une vessie natatoire. Sa peau est imprégnée de corps gras, jouant un rôle dans la régulation osmotique! Ce qui le rend impropre à la consommation à cause de son goût infâme! Le premier cœlacanthe est arrivé au laboratoire découpé, les malgaches avaient tenté de le consommer! Mais devant sa consistance inhabituelle, sa taille et ses particularités, les pêcheurs ont eu la bonne idée de l'apporter au laboratoire ( contre une belle somme d'argent malgré tout!! )
Il existe des mâles et des femelles, la fécondation est interne chez la femelle à la maturité sexuelle vers 20 ans, elle incube ses œufs après qu'ils aient été fécondés par le sperme d'un mâle. Ses œufs sont au nombre d'une dizaine, les œufs excédentaires sont détruits, comme chez certains requins. Les jeunes se développent dans des sacs embryonnaires et ils sont mis bas dans l'eau ( et non pondus!! ) quand ils atteignent environ 40 cm, et ce après une gestation de 13 mois!

Maintenant, on explique à Marc notre périple de cet après midi avec la raie manta... C'est effectivement interdit! Mais soyons réaliste, une loi est écrite la dessus, mais à Madagascar rien n'est appliqué ou tout est corrompu! Marc nous explique que ce petit musée fait l'objet de visites des enfants défavorisés des quartiers pauvres de Tuléar. Il espère avoir de l'impact sur ces jeunes, et pouvoir agir sur les générations futures. Mais il est plus que conscient de la situation. Pour lui, rien ne pourra changer les choses, la priorité est de lutter contre la famine, même s'il faut détruire des espèces menacées pour ça!


Nous rentrons au centre ville en pousse pousse, nos bagages nous suivent dans un cyclo pousse pousse! Nous sommes très heureux d'avoir fait la rencontre d'un de nos vieux cousins éloignés et d'en savoir un peu plus sur le mystérieux cœlacanthe!


2 commentaires:

  1. Quel monstre ce poisson!!!!! combien mesure t il et son poids???

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